DMG PARIS DIDEROT: Revue de Presse

Quel impact sur les prescripteur?

H. Gronier-Gouvernel, G. Robin. Risques cardiovasculaires de la contraception orale estro-progestative : au-delà de la polémique. Gynécologie Obstétrique & Fertilité 42 (2014) 174–181.



Remarque: ce résumé d'article a été écrit par un étudiant ou un enseignant du DEPARTEMENT DE MEDECINE GENERALE DE PARIS 7. Il est en accès libre. La rédaction des résumés est faite dans le cadre de la REVUE DE PRESSE du DMG.

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Résumé de l'article

INTRODUCTION

Cet article est une méta-analyse qui recense de nombreuses études de cohorte et cas-témoins.

Suite à la polémique médiatico politique et scientifique en 2012 liée au risque cardiovasculaire artériel ou veineux de la COP, l’image des médecins prescripteurs a été altérée surtout face aux patientes.

La COP est l’association d’un estrogène (Ethynil-Estradiol (EE)) et d’un progestatif. Les progestatifs sont classés en générations, selon leur mise sur le marché avec :

1ère génération: Noréthistérone, (noréthindrone), 2e génération : Lévonorgestrel, 3e génération : Désogestrel, Gestodène, Norgestimate. Les progestatifs les plus récents sont théoriquement plus anti- gonadotropes, permettant de diminuer le dosage en éthinyl- estradiol mais également moins androgénique. 4e génération : terme qui n’a aucun fondement pharmacologique, c’est des contraceptions extrêmement différentes comme les COP contenant :

Drospirénone : Jasmine, Jasminelle./ Progestatif prégnane : Acétate de Chlormadinone (Lutéran) ou Acétate de Cyprotérone (Androcur) (pas d’AMM en contraception en France en décembre 2013)/Estrogène naturel en association soit au diénogest soit à l’acétate de nomégestrol (Lutenyl)

RISQUE ARTÉRIEL SOUS COP ET IMPACT DU PROGESTATIF SUR CE RISQUE

Risque artériel faible estimé à 1 accident pour 10 000 utilisatrices par an, selon les résultats d’une méta-analyse récente une augmentation risque relatif d’AVC ischémique par rapport à des non-utilisatrices, sans augmentation du risque d’AVC hémorragique, un sur-risque modéré d’IDM a été constaté dans certaines études alors que d’autres ne le retrouvent pas ce sur-risque.

Une étude en 2002 évoquait un risque d’IDM augmenté sous COP, risque majoré pour les C2G par rapport aux C3G, mais c’est plutôt le dosage en EE qui serait responsable du sur-risque artériel que la génération de progestatif. Une grande étude de cohorte danoise en 2012 a retrouvé un risque cardiovasculaire dépendant du dosage en EE, risque plus élevé à 30 à 40 mg d’EE, sans de significativité pour les types de progestatifs utilisés, le risque lié à l’EE est confirmé dans une récente revue de la littérature concernant les études après 1990, risque plus élevé concernant les COP contenant un progestatif de 1ère génération. Ce risque reste très faible si les contreindications sont respectées.

RISQUE VEINEUX SOUS COP

Incidence des évènements thromboembolique : 3 pour 10 000 femmes sans COP, alors qu’il est estimé à 7/ 10 000 femmes chez les patientes sous COP. Ce risque avec ou sans COP a augmenté ces dernières années car augmentation de l’indice de masse corporel ? Amélioration du dépistage des évènements thrombo- emboliques ?

L’augmentation de ce risque par rapport à des non-utilisatrices a été évaluée à 3.5 par une méta-analyse récente, mais reste inférieur à celui lors de la grossesse, estimé à 29/10 000 femmes.

Le risque de survenue d’un accident veineux est maximal la 1ère année de prise estimé par un OR à 4,17 par rapport à des non-utilisatrices, puis se stabilise à 2,76 après 4 ans de prise.

COMMENT EXPLIQUER LE RISQUE VEINEUX SOUS COP

Le risque veineux sous COP lié au dosage EE a été démontré. Comme les progestatifs de 3e génération sont plus anti-gonadotropes, les pilules ont été commercialisées avec dose réduite en EE avec théoriquement une diminution du risque veineux mais plusieurs études rétrospectives ont montré un sur-risque lié au C3G qui a été confirmé à 3.8 par la méta-analyse de Stegeman et al en 2013. Ces résultats sont interprétés par le fait que les progestatifs récents sont moins androgéniques mais également moins anti-estrogéniques. Ainsi, les C3G au niveau hépatique créent un climat estrogénique plus marqué, ce qui induirait un sur-risque veineux.

QUEL EST LE RISQUE VEINEUX SOUS COP SELON LE PROGESTATIF

Sur quelques études rétrospectives par rapport aux femmes non-utilisatrices de COP :

Les C2G : sur-risque à 2.9 liée au Lévonorgestrel, sur-risque à 6.6 lié au Désogestrel.

Les C3G : sur-risque similaire au C2G avec la Norgestimate ce qui peut paraître surprenant puisque certains auteurs attribuent à ce progestatif une activité anti-androgénique, pour le Gestodène un sur-risque à 6.2.

Pour la COP contenant la Drospirénone, le risque est similaire aux C3G. Les COP contenant la chlormadinone, le surisque n’a pas été démontré. Les COP contenant de l’acétate de Cyprotérone, sur-risque à 6,8.

L’anneau vaginal composé d’étonogestrel (métabolite actif du désogestrel, progestatif de 3e génération) et d’EE : sur-risque embolique veineux par rapport aux non- utilisatrices de COP estimé à 6,48.

Le patch contraceptif composé de norelges- tromine (métabolite actif du norgestimate, progestatif de 3e génération) et d’EE : sur-risque veineux par rapport aux non-utilisatrices. Qu’il s’agisse de l’anneau vaginal ou bien du patch contraceptif, l’EE qui est un estrogène de synthèse puissant va exercer un effet de passage hépatique aussi important que lorsqu’il est administré par voie orale.

RISQUE VEINEUX POUR COP CONTENANT UN « ESTROGÈNE NATUREL »

En France, commercialisation récente de deux COP ne comportant pas d’EE mais un estrogène naturel (association valérate d’estradiol-diénogest et association 17-bêta estradiol-acétate de nomégestrol, progestatif de la famille norprégnane). L’analyse des paramètres de l’hémostase semble mettre en évidence moins de modifications qu’avec des pilules de deuxième génération, mais en l’absence de données épidémiologiques concernant les évènements cliniques , prudence et respect des mêmes contre-indications que les autres COP.

FACTEURS DE RISQUE

La thrombophilie constitutionnelle héréditaire ou mutation de novo. Une patiente porteuse d’une mutation du facteur V Leiden hétérozygote aurait 8 fois plus de risque d’accident veineux en dehors d’une COP , la prise d’une COP, quelle que soit lé génération du progestatif va exercer un effet synergique sur ce risque relatif pouvant aller jusque 50). La méta-analyse de Wu et al en 2005 estime, par rapport aux patientes sans thrombophilie constitutionnelle et utilisant une COP, un sur-risque d’accident veineux pour les patientes porteuses de mutation facteur V Leiden à 15,6, pour les déficits en anti-thrombine à 12,6, pour les déficits en protéine C à 6,3 et enfin pour les déficits en protéine S à 4,9.

Les recommandations d’experts préconisent la réalisation d’un bilan de thrombophilie uniquement si un antécédent familial est décelé.

QUELS SONT LES BÉNÉFICES DES C3G PAR RAPPORT AUX C2G

Supériorité légère pour la prise en charge de l’acné par les C3G contenant du norgestimate et les COP contenant de l’acétate de chlormadinone ou de l’acétate de cyprotérone par rapport aux C2G. Aucune différence significative en termes de prise pondérale ou d’arrêt de la COP pour prise de poids n’a été démontrée entre les C2G et C3G. Les symptômes pré-menstruels, la COP contenant de la drospirénone a été montrée plus efficace que le placebo. En revanche, le choix parmi les C2G reste limité. Donc, si mauvaise tolérance des C2G, il faut proposer les C3G. Enfin, la variabilité de la tolérance de la COP est un facteur à prendre en compte, outre les considérations épidémiologiques, afin d’optimiser l’observance.

QUE PRESCRIRE À NOS PATIENTES ?

Première prescription=C2G. Même si les études rétrospectives aient montré un sur-risque artériel corrélé au dosage d’EE, le prescripteur pourra toujours choisir entre une C2G dosée à 20 mg ou à 30 mg d’EE. Les dernières recommandations de l’ANSM Novembre 2013 envisagent également de prescrire en 1 ère intention les C3G contenant du Norgestimate, dont le risque thrombo-embolique, lors d’une association à 35 mg d’EE est identique à celui des C2G contenant 20 ou 30 mg d’EE. En deuxième intention=C3G ou autre si mauvaise tolérance des C2G, après information des patientes. En octobre 2013, l’Agence européenne du médicament (EMA) a souligné que toutes les COP ont un rapport bénéfice-risque favorable, et ce quel que soit la génération du progestatif

QUEL EST L’IMPACT DU RETRAIT DU MARCHÉ DE DIANE 35

Pour les patientes traitées pour acné par Diane 35 (association 35 mg d’EE à 2 mg d’acétate de Cyprotérone), le retrait brutal du marché français a été difficile, d’autant plus que ceci a coincidé avec une rupture de stock des C3G contenant du Norgestimate (AMM pour la contraception et la prise en charge de l’acné). L’agence européenne du médicament (EMA), avait réagi dès mai 2013, imposant à la France un retour de Diane 35 en 2014, dont les précautions d’usage sont d’éviter toute association avec une COP, éviter la prescription après 35 ans, rechercher les facteurs de risque veineux, prescrire Diane 35 en seconde intention pour le traitement de l’acné, information de la patiente du sur-risque thrombo-embolique encouru.


Commentaire

Cet article expose clairement les problématiques liées à la COP, sa limite est qu’il recense des études de cohorte et cas-témoins, dont la puissance est acceptable de par le nombre de sujets étudiés, mais la méthodologie reste critiquée car biais de sélection.

En effet, à chaque association estro-progestative correspond un risque, selon les données actuelles, les associations les moins risquées sont lévonorgestrel 20 mg d’EE, lévonorgestrel 30 mg d’EE, et norgestimate 20 mg d’EE, donc le mieux est de parler du risque lié à chaque COP que de parler du risque lié à chaque génération.

La polémique de 2013 a redonné toute l’importance à la consultation de prescription et à l’information claire des patientes.


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