DMG PARIS DIDEROT: Revue de Presse

Le régime végétarien prévient-il la survenue des cancers ?

Diallo A, Deschasaux M, Latino martel P, et al.Red and processed meat intake and cancer risk : result from the prospective NutriNet-Santé cohort study Int. J. Cancer ;



Remarque: ce résumé d'article a été écrit par un étudiant ou un enseignant du DEPARTEMENT DE MEDECINE GENERALE DE PARIS 7. Il est en accès libre. La rédaction des résumés est faite dans le cadre de la REVUE DE PRESSE du DMG.

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Résumé de l'article

Red and processed meat intake and cancer risk : result from the prospective NutriNet-Santé cohort study
INTRODUCTION :

L´Agence Internationale pour la Recherche sur le Cancer et l´OMS ont récemment classé la consommation de viande rouge et de viande transformée comme probablement cancérigène et cancérigène pour l´homme, respectivement.

L´OMS recommande une consommation hebdomadaire de viande rouge inférieure à 500g par semaine, et de viande transformée inférieure à 50g par jour.

Ces recommandations sont basées essentiellement sur des études évaluant l´association entre cancer colo-rectal et consommation de viande rouge et transformée avec un niveau de preuve considéré comme convainquant.

L´objectif de cette étude prospective était d´évaluer l´association entre la consommation de viande rouge et de viande transformée, avec le risque de cancer tout confondu, de cancer du sein et de cancer de prostate.

METHODE :

Il s´agit d´une étude de cohorte prospective menée de Mai 2009 à Aout 2015, publiée dans le ´international journal of cancer´, et uniquement financée par des organismes publiques dont l´INSERM.

Nutrinet Santé est une cohorte lancée en 2009 en France. Le recrutement des sujets et des informations se fait par internet grâce un site dédié : www.etude-nutrinet-sante.fr La participation est spontanée et concerne tous les adultes de plus de 18 ans.

La collecte des informations sur le régime alimentaire des participants a été réalisée par l´intermédiaire de questionnaires internet validés. Tous les 6 mois, les participants devaient détailler la composition de leurs prises alimentaires sur 3 jours sélectionnés aléatoirement pendant une période de 15 jours.

Plus de 3300 items différents étaient disponibles pour définir la composition des 3 repas journaliers et de toutes les autres prises alimentaires sur 24h. La taille des portions était évaluée par des photos validées et la valeur nutritionnelle des aliments était définie sur la base de recettes françaises validées par des nutritionnistes.

La viande rouge était définie par toute pièce de viande fraiche, hachée ou congelée : boeuf, veau, porc et agneau. La viande transformée était définie par toute pièce de viande conservée par une autre méthode que la congélation : salée, fumée, marinée, séchée, braisée, incluant le jambon le bacon, les saucisses, le boudin, le paté, le salami, la mortadelle, et toutes les sauces en conserve à base de viande.

Tous les diagnostics de cancer primaire pendant la période de l´étude ont été considérés comme des évènements, excepté le cancer cutané basocellulaire.

Le recueil des évènements était fait par déclaration spontanée par l´intermédiaire de questionnaires de santé soumis annuellement aux participants, ou lors de questionnaires de santé spécifiques distribués tous les 3 mois, ou bien sur une page du site internet dédié disponible en permanence. Les données étaient ensuite vérifiées par un médecin indépendant.

Toutes les données ont été ajustées sur l´âge, le sexe, le BMI, la taille, l´activité physique, l´intoxication tabagique, nombre de questionnaire alimentaire rempli, la prise de fruits et de légumes, le total de lipide, l´intoxication alcoolique, les antécédents familiaux de cancer, le niveau scolaire.

Les données étaient ajustées également sur l´ensemble des facteurs confondants concernant le cancer du sein : nombre d´enfant, statut ménopausique, prise d´une contraception orale, et d´un traitement hormonal.

RESULTATS :

Les personnes âgées de moins de 35 ans ont été exclues. 61476 personnes ont été inclues dans l´étude.

1609 évènements ont été recensés, parmi lesquels : 544 cancers du sein (169 pré ménopause - 375 post ménopause) , 222 cancers de la prostate, et 843 autres cancers (169 cancers de la peau, autres que les basocellulaires, 120 cancer colorectal, 64 lymphomes, 63 poumons, 39 thyroïde, 38 ORL, 38 vessie, 37 utérus, 35 leucémies, 30 reins et 210 autres).

La consommation de viande rouge a été associé avec une augmentation de risque de cancer global (HR=1,83, IC 95% : 1,33 - 2,51 , p=0,01) , ainsi qu´une augmentation du risque de cancer du sein (HR=1,83, IC95% : 1,33 - 2,51, p=0,002), association significative dans les 2 sous-groupes : pré-ménopause et post-ménopause.

L´étude n´a pas démontré d´association entre consommation de viande rouge et cancer de la prostate. L´étude n´a pas démontré d´association entre consommation de viande transformée et survenu de cancer, quel qu´il soit. L´étude n´a pas démontré d´interaction avec la consommation de légumes et de fruit sur les différentes associations significatives.

DISCUSSION :

Dans cette large cohorte, la consommation de viande rouge était significativement associée avec la survenu d´un cancer multisite, et la survenu du cancer du sein.

Ce résultat est en accord avec les résultats de plusieurs méta-analyses récentes qui démontrent également le lien entre la consommation de viande rouge et de viande transformée avec la survenu de cancer.

Dans cette étude, le lien entre la consommation de viande rouge et de viande transformée et la survenu de cancer colo rectal n´a pas été mise en évidence. Ceci s´explique simplement avec la faible répresentation de cancer colo rectal dans l´étude. Cette association a déjà été démontrée dans de nombreuses études nationales et internationales.

Dans cette étude, le lien entre la consommation de viande transformée et la survenue de cancer n´a pas non plus été démontré. Il existe pourtant de nombreuses études qui ont déjà démontré son association avec le cancer colo rectal, le cancer du sein, le cancer de l´estomac, et le cancer du pancréas. Une des hypothèses possibles est le fait que la consommation de viande transformée était particulièrement basse chez les participants de la cohorte Nutrinet Santé. La consommation moyenne du quintile supérieur était de 45g/j pour les hommes et 29g/j pour les femmes. Dans la population générale française, il est admis que plus d´un quart de la population consomme plus de 50g de viande transformée par jour.

Ceci amène à une précaution concernant l´extrapolation des résultats à la population générale. Un biais d´inclusion semble inévitable, la participation spontanée via un questionnaire internet sélectionne des individus avec une conscience des comportements alimentaires à risque et un niveau socio-professionnel plus élevé que la moyenne de la population générale. Les comportements alimentaires à risque ont pu être sous représentés dans cette cohorte. Ce qui est potentiellement une hypothèse expliquant explique le manque de résultats significatifs sur l´association entre cancer et consommation de viande transformée.

Les études expérimentales réalisées sur des modèles animaux, supportent les résultats de cette étude en mettant en évidence le rôle pro-carcinogène de certains composants présents dans la viande rouge. Le pourcentage élevé de fer héminique notamment pourrait initier des mécanismes pro carcinogènes via la production de radicaux libres après peroxydation des lipides dans le tube digestif.

La force de cette étude est la qualité et l´innovation du recueils des informations sur le régime alimentaire des participants : The nutrinet-Sante Study: a web-based propesctive study on the relationship between nutrition and health and determinants of dietary patterns and nutritional status. BMC Public Health 2010

En conclusion, cette étude suggère donc que la limitation de la consommation de viande rouge ne serait pas uniquement bénéfique pour la prévention du cancer colo rectal mais aussi pour la prévention des autres cancers, notamment le cancer du sein.


Commentaire

COMMENTAIRES

La présentation de cette étude a été suivie d´une discussion à propos de cet article. Les éléments qui en ressortent sont que les recommandations actuelles conseillent une consommation de viande de rouge inférieure à 500mg par semaine et qu´il est encore trop précoce pour proposer une consommation plus basse aux patients dans la pratique courante. On peut d'ailleurs se poser la question de la validité de cette valeur seuil . La viande rouge est une source facile de fer et d´acides aminés qu´il est difficile de remplacer dans l´alimentation sans une réflexion approfondie sur les valeurs nutritionnelles de la composition de son régime.

Savoir reconnaitre certaines pratiques de consommation excessive de viande rouge et/ou transformée peut éventuellement être amené à une mise en garde simple. Mais changer les habitudes alimentaires des patients ne semble pas accessible à une éducation thérapeutique seul au cabinet. De plus les conditions socio-culturelles et économiques sont un facteur déterminant sur la composition des régimes alimentaires de nos patients.


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